C’est devenu un rituel. Chaque fois que la grande famille du cinéma suisse se réunit, à Locarno ou à Soleure, Nicolas Bideau est vilipendé.
Cracher sur Bideau est devenu pour certains cinéastes le
meilleur moyen de faire parler d’eux. Pauvre publicité.
Que reproche-t-on au Chef de la section cinéma de l’Office
fédéral de la culture depuis bientôt quatre ans? De vouloir des films
populaires, de qualité, avec du glamour. Bref M. Cinéma a de l’ambition, il ne
veut pas se contenter de distribuer le maigre argent public fédéral à
disposition en arrosant tous les quémandeurs. Il opère des choix.
J’ai de la peine à voir le scandale, l’injustice, le « totalitarisme »,
et avant d’articuler ce dernier grand mot, certains réalisateurs gagneraient à
consulter quelque livre d’histoire.
Dans la petite Suisse, Nicolas Bideau est une tête qui
dépasse, une grande gueule née à Genève, acclimatée à Lausanne, qui a
l’outrecuidance de dire tout haut ce qu’il pense franchement. Sacrilège dans le
magasin de porcelaine de la culture helvétique. Il ferait plus parler de lui
que du cinéma suisse, essayait-on de nous démontrer dimanche soir dans Mise au
Point sur la TSR.
Dans cette curée mesquine, certains oublient qu’il y a à
peine quelques mois le clonage de Nicolas Bideau était demandé. Anne Bisang,
directrice de la Comédie de Genève, suggérait l’été dernier, que le théâtre
puisse aussi avoir son Bideau pour se mettre en valeur.
C’est le moment de rappeler que Nicolas Bideau n’est pas
qu’un « fils de », tombé dans la marmite du cinéma depuis qu’il est
tout petit. Pour se forger un prénom, le fils de Jean-Luc l’acteur a accompli
de brillantes études qui l’ont mené à la carrière diplomatique. Il y a quelques
années, Micheline Calmy-Rey et Pascal Couchepin se sont disputés les talents de
ce sinologue. Nicolas Bideau parle en effet chinois couramment, c’est une
qualité assez rare au sein du Département fédéral des affaires étrangères. Conseiller diplomatique de Pascal
Couchepin pendant sa première année présidentielle en 2003, il a assisté à
certaines discussions du G8 d’Evian. Une expérience unique pour un diplomate
suisse.
Le cinéma suisse ne mérite pas Nicolas Bideau. S’il ne sait
pas apprécier ses talents, alors qu’on le rende à la carrière diplomatique, qui
saura mieux que des créateurs grincheux et jaloux, en faire bel usage.
* Chroniques sur LFM (103.3), du lundi au vendredi, à 7h50
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